Peu d'armées dans l'Histoire ont suscité autant de craintes. L'Armée russe fut l'incarnation d'un régime totalitaire, un outil exceptionnel de conquête et de contrôle, une machine de guerre d'une terrible efficacité. Aujourd'hui, l'armée russe inquiète par sa force (retrouvée), sa brutalité tournée à la fois vers elle-même et vers ses adversaires, son jusqu'au boutisme, et, tout à la fois, fascine par son art de penser et d'engager le combat, par sa capacité de réaction et de décision.
En à peine plus de 100 ans d'existence, elle a eu plusieurs vies : l'armée de la révolution sous l'égide de Trotski, née sur les cendres de l'armée impériale; les grandes purges de l'entre-deux-guerres, folie stalinienne qui a assassiné les plus brillants des cerveaux russes ; le conflit germano-soviétique de 1941 à 1945 qui a précipité l'Armée rouge au bord du gouffre ; la renaissance extraordinaire, la résilience, l'adaptation puis le triomphe sur le champ de bataille, à Stalingrad, Koursk, Berlin. Il y eut par la suite l'armée soviétique qui a fait trembler le monde durant la Guerre froide puis, l'armée russe, celle de la chute du Mur, en 1991, chaotique, misérable, enlisée en Tchétchénie. Enfin, celle de Vladimir Poutine, à partir des années 2000, rénovée, réorganisée, et qui joue aujourd'hui un rôle important dans le nouvel ordre mondial en replaçant la Russie sur l'échiquier des relations internationales.
Historien spécialiste en histoire des relations internationales et en histoire militaire, Boris LAURENT a commenté les carnets de guerre du maréchal Paulus - La bataille de Stalingrad - et du général Patton. Il est également l'auteur de La guerre totale à l'Est (1941-1945), tous parus chez Nouveau Monde.